Laval Virtual 2018 – L’avenir a de l’avenir

Thought Leadership
benjamin.bartholet

5 octobre 2017, un bâtiment bardé de triangles et de baies vitrées ouvre ses portes en périphérie de Laval, au cœur de la Mayenne. Ce nouveau phare sur l’horizon de l’innovation est une structure unique qui héberge un centre de recherche autour des médias immersifs ou encore une école. Le Laval Virtual Center et le tissu économique qui l’entoure, on le doit à François d’Aubert qui a eu le nez bien creux il y a 20 ans en misant sur ces technologies alors relativement balbutiantes dans un bassin industriel en pleine transition.



Et justement, pour cet anniversaire, Laurent Chrétien (l’actuel Directeur du festival et du centre) et son équipe ont vu grand. Plus de 300 exposants sur une surface doublée voire triplée au fil des années, un centre des cultures scientifiques investi à l’occasion des tout nouveaux Tech Talks et l’exposition d’art numérique Recto VRSO. Fervents ambassadeurs du virtuel et créateurs d’expériences immersives, nous ne pouvions rater cet incontournable du paysage numérique en France et dans le monde, où se côtoient grands comptes, designers, industriels et ingénieurs.



C’est sous un soleil timide que les portes s’ouvrent alors que nous admirons le site agrandi, malgré des allées qui paraissent clairsemées. Victime des grèves SNCF, le festival a tout de même réussi à limiter la casse en affrétant des navettes Paris-Laval prises d’assaut matin et soir pour rétablir une fréquentation normale les deuxième et troisième journées.



Laval Virtual 2018

Cartographier la réalité



En matière de réalité virtuelle et augmentée, la reproduction et la captation de la nôtre devient primordiale, que ce soit pour des raisons esthétiques ou fonctionnelles.



Google le sait bien, et donne le coup d’envoi des festivités en participant à la Keynote d’ouverture pour aborder ses dernières avancées. Le géant est notamment venu détailler Light Field, solution légère de captation et diffusion volumétrique à 180° développée à l’aide de rigs personnalisés révélée voilà quelques semaines. L’amélioration constante des technologies temps-réel permet en effet d’utiliser de plus en plus d’outils de ce type pour obtenir un rendu le plus fidèle possible à la réalité dans les casques et téléphones des publics.



La présence de Google n’est pas anodine, puisqu’entre Light Field, AR Core, Google Maps AR API et Daydream, le californien fait définitivement parti des grands acteurs les plus actifs dans le domaine auto-baptisé de l’immersive computing (le terme consacré chez Google pour parler de VR et d’AR).



Unity par ailleurs, l’un des moteurs 3D les plus utilisés sur le marché a présenté lors de sa conférence le projet Fontainebleau, reconstitution presque parfaite de la forêt du même nom en libre accès pour un usage temps-réel très performant. Le court métrage Adam a bien évidemment été mis à l’honneur, puisque les deux suites ont été réalisées par Monsieur Neil Bloomkamp (District 9, Chappie…) totalement en 3D temps réel à l’aide de photogrammétrie et de motion capture. Ils n’étaient bien évidemment pas les seuls, avec par exemple la présence remarquée d’un Light Field maison par Technicolor, capable de reconstruire une scène en 3D à partir d’une grille de 16 caméras standards.



Laval Virtual 2018 - Hololens

Naviguer les réalités



De telles installations viendront notamment nourrir les algorithmes tournant sur les actuels et futurs casques de réalité augmentée. En effet, ceux-ci se destinant plutôt à une utilisation quotidienne dans des situations très variées, le tracking de positionnement et la détection de surface doivent être en permanence améliorée. Microsoft Hololens, bien qu’ayant quelques années maintenant fait toujours office de référence en matière de casque AR autonome et les technologies développées pour celui-ci sont maintenant présentes dans les casques VR sans capteurs de l’initiative Windows Mixed Reality Platform.



Mais l’hégémonie de la firme de Redmond commence à s’effriter avec l’arrivée de concurrents tels que le Meta, casque non-autonome mais bénéficiant d’un hand-tracking convaincant et surtout d’un champ de vision bien plus large que la toute petite fenêtre visible chez le leader. Et si un signal doit être détecté cette année, c’est bien dans le domaine des industries lourdes où la réalité augmentée déploie ses ailes. Aéronautique, métallurgie, maintenance… Tous les cas d’usages sont bons pour assister l’opérateur, le guider dans ses étapes, l’informer sur les stocks. Les solutions elles-mêmes sont très variées, du form-factor à-la Magic Leap de DAQRI à la combinaison compatible Hololens en passant par le casque de chantier avec masque AR intégré. Le B2B a ici un train d’avance et explore l’avant-garde du « wearable », tandis que le grand public découvre à peine les possibilités offertes par les frameworks mobiles sortis en 2017.



Laval virtual 2018- VR eau

Augmenter le virtuel



La réalité virtuelle n’est bien sûr pas en reste, confirmant année après année la maturité du marché. Malgré quelques incertitudes en termes de succès l’année dernière dans les médias généralistes, la VR a de beaux jours devant elle. Et Laval Virtual, comme à l’accoutumée, donne à voir le lendemain en prenant le présent pour acquis. Les professionnels l’ont bien compris car la tendance de cette édition est d’aller au-delà de l’installation VR classique (Casque + contrôleurs) et de réfléchir à tous les moyens possibles pour accentuer davantage l’immersion et accéder aux tant recherchées 4D voire 5D. L’apparition et le développement des salles d’arcades et autres espaces de jeux dans les malls a fait un appel d’air sur tous les fabricants d’appareils venant augmenter la réalité virtuelle.



La réalité virtuelle n’est bien sûr pas en reste, confirmant année après année la maturité du marché. Malgré quelques incertitudes en termes de succès l’année dernière dans les médias généralistes, la VR a de beaux jours devant elle. Et Laval Virtual, comme à l’accoutumée, donne à voir le lendemain en prenant le présent pour acquis. Les professionnels l’ont bien compris car la tendance de cette édition est d’aller au-delà de l’installation VR classique (Casque + contrôleurs) et de réfléchir à tous les moyens possibles pour accentuer davantage l’immersion et accéder aux tant recherchées 4D voire 5D. L’apparition et le développement des salles d’arcades et autres espaces de jeux dans les malls a fait un appel d’air sur tous les fabricants d’appareils venant augmenter la réalité virtuelle.



Par exemple, jouer à un shooter première personne n’a jamais été aussi réel que depuis qu’on peut courir sur un tapis et s’accroupir derrière les murets sans autre forme de contrôle que ses jambes et une arme physique.
On a été agréablement surpris par un dispositif japonais qui souffle (littéralement) le chaud et le froid sur votre nuque tandis que vous vous baladez entre une banquise et un désert.
On a été secoué en pilotant des voitures de Project Cars sur un fauteuil vibrant programmé par Optima, qui incarne ce métier en plein essor : celui de designers de mouvements.
Le mélange du physique et du virtuel est toujours impressionnant et perturbant pour les sens. Le studio XXII a bien intégré cette notion en ré-éditant une expérience de ce type dans laquelle en compagnie d’un ami, vous réparez le moteur d’un sous-marin steampunk digne des romans de Jules Verne, à l’aide de leviers et de manivelles physiques.
A contrario, le concept de l’expérience VR sous-marine du Dolphin Swimming Club est séduisante de prime abord ; mais ici c’est l’exécution qui est assez décevante puisqu’il ne s’agit « que » d’un mobile Samsung waterproof diffusant du contenu 360 sur un masque de plongée. On espérait mieux.



Enfin, mention spéciale aux étudiants à l’origine du jeu Hunter, #SocialVR et multi-support par excellence puisqu’il met en scène 2 joueurs dans une expérience à gameplay asymétrique. En effet, l’un des joueurs se balade dans un manoir en VR pour chasser un fantôme incarné par son adversaire. L’autre joueur a pour mission de faire grimper le rythme cardiaque du premier en lui faisant peur via un écran tactile géant lui affichant une carte du manoir. Un capteur viendra témoigner de cette fréquence cardiaque pour influer sur les points de vie du Ghostbuster. Un bijou de Game Design et une belle pile de technologie !



Laval Virtual- VRHero

Le virtuel : une affaire de hardware



Nous l’avons évoqué, les acteurs cherchent maintenant à accentuer l’expérience à l’extérieur du casque, mais qu’en est-il des casques eux-mêmes ?



HTC n’en finit pas d’asseoir son standard sur le salon avec le Vive, et pour quelques chanceux le Vive Pro. Le dernier né de la collaboration HTC-Valve amène un design plus ergonomique, plus agréable à porter ainsi qu’une résolution bien plus élevée sur la dalle face à vos yeux. Exit l’immonde grille de pixels, elle est ici presque imperceptible. Oculus a décidément du retard à rattraper.



Mais ce n’est pas le champion dans la catégorie, les ingénieurs de chez VRG vous équipent avec leur casque grand format au design agressif (les deux grands yeux lumineux doivent sûrement jouer un peu) pour vous faire vivre l’ultime expérience avec 4K devant chaque œil. Et le résultat est impressionnant, la peinture métallisée de la voiture en 3D photo-réaliste se met à perler comme en vrai quand on s’approche et le champ de vision de 160° est très confortable. Ce qui est moins agréable par contre, c’est le casque lui-même, lourd comme un parpaing et difficilement utilisable sur de longues sessions.



L’étoile du salon, c’est la chimère StarVR qui se fait désirer pour tout test de quelques minutes. S’il brille, c’est par son champ de vision hors du commun : 210°. Autant dire que l’utilisateur est incapable de voir les bords latéraux de l’image et le fait de profiter du monde virtuel dans sa vision périphérique décuple l’immersion. Si pour l’instant StarVR semble prendre une direction très orientée industrie, il nous tarde de voir des utilisations grand public d’un tel appareil.



Laval Virtual 2018- Art install festival

Les artistes : créateurs de mondes



L’art numérique est à l’honneur cette année puisque l’exposition Recto VRSO proposée par Judith Guez de Art/VR disposait d’un IN indépendant du site principal et d’un OFF disséminé dans la ville. On y retrouve œuvres d’étudiants et d’artistes confirmés, tantôt sur l’émotion, tantôt sur la représentation du corps ou encore l’expérimentation des sensations des autres.



Via ces nouveaux médias, les créateurs s’en donnent à cœur joie pour créer des mondes surréalistes, explorer des interactions nouvelles et donner à ressentir des sensations inédites. Il est toujours plaisant de constater qu’il est donné à voir à un grand public, rarement habitué à ce genre de proposition de pièces ambitieuses, esthétiques et poétiques, camouflant la technologie pour renforcer la magie du virtuel. Puisqu’après tout, il n’est dans tout ça que question d’illusion et leurre du cerveau, n’est-ce-pas ?



Laval Virtual 2018- RectoVRSO

Bouillon primitif



Il serait impossible de prétendre couvrir l’ensemble de ce qui est proposé à Laval Virtual en restant synthétique. Véritable bouillon fourmillant d’ingéniosité et de créativité, soyons d’abord chauvins en étant fiers de disposer d’une telle référence Made In France.
On peut regretter un certain manque de lisibilité des propositions, un équilibrage des disciplines et des publics pas toujours très ajusté, mais Laval arrive encore et toujours à attirer les faiseurs du monde entier. Les acteurs eux-mêmes, marché vivace oblige, exposent des produits toujours plus finalisés, toujours plus industrialisés, y compris chez les laboratoires de recherche. C’est une diversité fabuleuse qui favorise les échanges d’idées et les croisements des futurs. Et le plus excitant pour tout visiteur qui prend un billet pour après-demain, c’est que l’immersion fait encore ses premiers pas.



Laval Virtual, c’est finalement un peu ce miroir qui permet de voir au-delà du coin de la rue ; par sécurité d’abord, mais en définitive et surtout, par curiosité.